Dans le droit italien des sociétés, le collège syndical est l’organe de contrôle de la société par actions qui adopte le modèle traditionnel de gouvernance d’entreprise. La particularité principale de ce modèle de gouvernance consiste dans le fait que les membres du conseil d’administration et les membres du collège syndical sont élus par l’assemblée générale des actionnaires.

Les administrateurs sont investis du pouvoir d’administration, tandis que les membres du collège syndical sont investis d’une mission de contrôle et de surveillance. Aux termes de l’article 2403 du Code civil, le collège syndical doit veiller au respect de la loi et des statuts, veiller au respect du principe de correcte administration, vérifier l’adéquation de l’organisation administrative et comptable de l’entreprise, ainsi que son effective mise en œuvre, et assurer la fiabilité des informations destinées aux investisseurs et aux marchés[1].

Il n’y a pas de doute que le thème de la responsabilité civile des membres du collège syndical est l’un des points les plus sensibles de la gouvernance d’entreprise.

A titre liminaire, il convient de rappeler brièvement que la responsabilité civile des membres du collège syndical est encadrée par les dispositions légales du Code civil. Plus précisément, l’art. 2407, alinéa 2, du Code civil dispose que les membres du collège syndical sont solidairement responsables avec les administrateurs pour les faits ou omissions de ceux-ci, lorsque le dommage ne se serait pas produit s’ils avaient veillé conformément aux obligations relatives à l’exercice de leur fonction.

La portée de cette norme a été toujours critiquée par la doctrine italienne parce qu’elle – telle qu’il est formulé et interprété par la jurisprudence – met sur un pied d’égalité les administrateurs et les membres du collège syndical. Alors qu’en réalité, les fonctions exercées par le collège syndical sont totalement différentes de celles exercées par les administrateurs.

L’art. 2380-bis du Code civil établit que : « la gestion de l’entreprise relève de la compétence exclusive des administrateurs, qui effectuent les opérations nécessaires à la réalisation de l’objet social ».

Les membres du collège syndical dans l’exercice de leur mission ne sont pas tenus de vérifier la gestion de l’entreprise. Le périmètre du contrôle est, en effet, plus limité. Au terme des dispositions du Code civil, le collège syndical doit veiller à ce que le principe de correcte administration a été respecté par les administrateurs dans l’exercice de leur mandat. Ce qui veut dire que le collège syndical ne doit pas vérifier le bien-fondé des choix de gestion, mais il doit s’assurer de la légitimité de ces choix et vérifier l’exactitude du processus décisionnel.

L’absence de critères précis pour déterminer les responsabilités incombant aux membres du collège syndical – au-delà bien entendu des hypothèses d’infractions intentionnelles – a conduit les juges à prendre des décisions décevantes – la plupart desquelles fondées sur le principe de la responsabilité objective ou de la responsabilité de plein droit qui ne requiert pas la faute comme condition – et dont les arguments ont été largement critiqués.

L’interprétation très rigoureuse de l’art. 2407 du Code civil a, de fait, amené les juges à prononcer – au cours de ces quinze dernières années – un flux de sentences assorties de sanctions pécuniaires importantes à l’égard des membres du collège syndical.

Il n’est pas anodin que le secteur du contrôle, au sein des sociétés par actions, est entré en crise. L’association de catégorie[2] relève à ce sujet que les meilleurs professionnels du secteur refusent de siéger au collège syndical car la menace d’une responsabilité automatique, susceptible de les exposer à un risque judiciaire et financier important, décourage toute initiative individuelle.

Projet de loi n°1276 portant sur la responsabilité des membres du collège syndical

Partant de ces constats, le 4 juillet 2023 a été déposé à la Chambre des députés le projet de loi n°1276 portant modification de l’art. 2407 du Code civil, en matière de responsabilité civile des membres du collège syndical.

Approuvé par la Chambre des députés le 29 mai 2024, le projet de loi n°1276 est actuellement en discussion au Senat, où une procédure accélérée a été mise en place pour faciliter son approbation définitive.

La proposition de loi vise à aligner les règles concernant la responsabilité civile des membres du collège syndical sur celles qui s’appliquent dans d’autres pays de l’Union européenne, et à introduire dans l’ordre juridique italien une méthode de détermination des sanctions pécuniaires fondée sur le « système de compensation multiple ».

Ce système suppose l’existence d’un lien direct entre le montant de la sanction pécuniaire infligée pour les dommages causés par le collège syndical et le montant de la rémunération annuelle versée en faveur de chaque membre du collège syndical.

Un tel système présente, sans doute, l’avantage de garantir une meilleure sécurité juridique accrue puisqu’il permet d’apprécier la responsabilité civile de chaque membre du collège syndical au regard de l’importance, de la complexité et de la nature de la tâche concrètement accomplie par celui-ci.

Le texte de l’article 2407, alinéa 2 du Code civil ainsi modifié, dispose que les membres du collège syndical sont responsables envers la société, les associés, les créanciers et les tiers en cas de manquement à leurs devoirs-pouvoirs de contrôle. Les critères de référence pour la détermination de la sanction pécuniaire applicable dépendent du montant du plafond ainsi que de la taille de l’entreprise. Le législateur a ainsi identifié les plafonds et les multiples suivants :

  • Pour les rétributions dont le plafond est fixé à 10 000 euros, 15 fois la rémunération
  • Pour les rétributions dont le plafond est compris entre 10 000 et 50 000 euros, 12 fois la rémunération
  • Pour les rétributions supérieures à 50 000 euros, 10 fois la rémunération.

Le projet de loi intervient également sur la question relative à la prescription de l’action en responsabilité. Le but est d’harmoniser les dispositions en matière de prescription de façon à assurer l’égalité de traitement entre les membres du collège syndical et les reviseurs légaux.

L’article 2407, alinéa 4 du Code civil dispose désormais que l’action en responsabilité à l’égard des membres du collège syndical se prescrit dans un délai de cinq ans à compter du dépôt du rapport sur le bilan (visé à l’article 2429 du Code civil) relatif à l’exercice au cours duquel le dommage est survenu.

 

gp@giovannellapolidoro.com

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[1] v. art. 2403 du Code civil.

[2] v. Consiglio dell’ordine dei dottori commercialisti et degli esperti contabili, “Proposta di legge: Modifica dell’articolo 2407 del Codice civile, in materia di responsabilità dei componenti del collegio sindacale”, 12 mars 2024